Précédé par sa réputation de prince réformateur pressé, Mohammed bin Salman, désormais appelé MBS (les initiales de sa célébrité internationale), s’emploie à prouver qu’elle n’est pas surfaite en s’attaquant simultanément à plusieurs grands chantiers chez lui, au cœur d’une monarchie saoudienne dont il bouscule, depuis quelques mois, les schémas de pensée et l’immobilisme dogmatiques.
Pour sa première interview télévisée accordée à CBS, une véritable institution aux Etats-Unis, le nouvel homme fort de Riyad, auteur d’une purge spectaculaire parmi les puissants du royaume, s’est fait le fervent défenseur des droits des femmes, ce vaste chantier où il y a tout à faire…
Alors que des premiers frémissements se sont fait sentir en faveur de l’émancipation des Saoudiennes, à l’image du décret royal historique qui a mis un terme à une interdiction de conduire archaïque, l’audacieux MBS a ouvert une brèche dans le très strict code vestimentaire imposé à la gent féminine.
Dans une Arabie saoudite où l’abaya noire est la tenue correcte exigée, sous peine de voir débarquer les escadrons de la Muttawa, la police religieuse placée sous l’autorité du Comité pour la promotion de la vertu et la prévention du vice, il s’est prononcé, à une heure de grande écoute et sur la chaîne américaine la plus regardée du pays, en faveur du libre choix accordé aux femmes de s’habiller selon leurs goûts, décemment cela va de soi.
Sans aller jusqu’à laisser la traditionnelle abaya dans l’armoire, MBS a toutefois appelé à libérer ses concitoyennes de son port obligatoire, se référant à la charia pour étayer son propos. « Les lois sont très claires. Il est stipulé dans les lois de la charia que les femmes doivent porter des vêtements respectueux et décents comme les hommes. Ceci, cependant, ne spécifie pas particulièrement une abaya noire ou que la tête soit couverte de noir. La décision est entièrement laissée aux femmes de décider quel type de tenue décente et respectueuse elles souhaitent revêtir », a-t-il déclaré.
Prônant un retour éclairé aux sources, en s’inspirant de l’islam au temps du Prophète, le tout-puissant prince héritier, qui n’est pas homme à mâcher ses mots, a enfoncé le clou : « Nous avons des extrémistes qui interdisent formellement la mixité hommes-femmes, et qui sont incapables de faire la différence entre un homme et une femme seuls ensemble, et deux collègues qui travaillent ensemble. Ces idées rigoristes contredisent l’art de vivre du temps du Prophète et des califats. Il faut revenir aux règles de vie en société qui avaient cours à cette époque-là. »