Kenya : une survivante retrouvée 50 heures après le massacre de Garissa

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dim, 2015-04-05 11:40

Cachée dans un placard, cette chrétienne de 19 ans priait pendant que les islamistes accomplissaient leur sinistre besogne. D'autres survivants racontent les détails glaçants du massacre qui a fait 148 morts. Trois jours de deuil national ont été décrétés.

Deux jours après le carnage de Garissa, le Kenya traumatisé pleure ses morts. Le président kényan Uhuru Kenyatta a décrété samedi trois jours de deuil national. «Je décrète trois jours de deuil, durant lesquels nos drapeaux seront mis en berne», a déclaré, dans une allocution télévisée depuis la présidence, Kenyatta qui ne s'était pas exprimé depuis la fin jeudi soir de l'attaque.

Les islamistes Chebab ont déjà promis, eux, d'autres massacres à venir. «Si Dieu le permet, rien ne nous arrêtera dans notre vengeance des morts de nos frères musulmans jusqu'à ce que votre gouvernement cesse son oppression et jusqu'à ce que toutes les terres musulmanes soient libérées de l'occupation kényane», ont lancé les Chebab dans un communiqué publié en anglais samedi matin. «Jusqu'à cette date, le sang va couler à flots rouges dans les villes du Kenya, cela va être une longue, épouvantable guerre dont vous, la population kényane, êtes les premières victimes».

Le dernier bilan du massacre méthodique de jeudi est de 148 victimes: 142 étudiants, trois policiers et trois militaires. Auxquels il faut ajouter 104 blessés, certains dans un état critique. C'est l'attaque la plus meurtrière sur le sol kenyan depuis l'attaque terroriste perpétrée par al-Qaïda contre l'ambassade américaine à Nairobi en 1998, qui avait fait 213 morts.

Elle s'étale le sang d'un ami sur le visage pour survivre

Une survivante a été découverte dans une penderie, plus de 50 heures après l'attaque, par les forces de sécurité qui ratissent le campus à la recherche de rescapés ou d'éventuels suspects.

Cynthia Cheroitich, 19 ans, est restée cachée dans un placard pendant que les islamistes accomplissaient leur sinistre besogne, et a refusé d'en sortir même quand ses camarades sont sortis de leurs cachettes. Les policiers qui passent la zone au peigne fin ont entendu du bruit venant d'un placard et lui ont demandé de sortir. Elle a refusé et un professeur a dû la convaincre qu'elle était en sécurité pour qu'elle accepte de s'extraire de sa cachette.«Elle n'arrêtait pas de demander aux forces de sécurité de lui assurer qu'ils n'étaient pas des chebab avant de sortir», a expliqué un policier.

Elle était tellement assoiffée qu'elle a bu de la lotion pour se sustenter, rapporte l'Associated Press. «Je priais mon Dieu» a simplement commenté cette chrétienne au sortir de son calvaire. Quatre autres survivants ont été découverts sur le campus.

D'autres détails sanglants émergent deux jours après le drame. D'après des témoignages de survivants relayés par CNN, les islamistes ont parcouru le campus, triant méthodiquement les musulmans et les chrétiens, épargnant les premiers, tuant les seconds. Ils ponctuaient leur macabre tâche de sermons religieux. CNN livre un récit circonstancié de l'attaque par une survivante, Hellen Titus.

Les assaillants les ont tous mis dans une salle, raconte-t-elle, leur ont demandé de s'allonger, puis leur ont lu des passages du Coran interdisant le meurtre des femmes. Ils ont d'abord tué les hommes. Puis finalement ont tourné leurs armes vers les femmes aussi. Pour survivre, l'étudiante s'est étalée le sang d'un de ses amis sur le visage et a fait semblant d'être morte. «Je me suis frottée, imbibée de ce sang… Ils m'ont oubliée», témoigne la jeune femme.

Cinq suspects arrêtés, les corps des 4 terroristes exposés à la foule

Les quatre terroristes auteurs de ce carnage ont été tués pendant l'assaut. Leurs corps, dont la foule réclamait la vue devant la morgue, ont été finalement exposés sur un truck qui a fait le tour de la ville. Mohamed Mohamud, soupçonné par la police kényane d'être le cerveau du massacre, est un ex-enseignant kényan qui s'est radicalisé dans son pays. La police offre une récompense de 20 millions de shillings (200.000 euros) pour toute information susceptible de mener à son arrestation.

Les autorités kenyanes ont annoncé avoir arrêté cinq personnes. «Nous les soupçonnons d'être des complices des assaillants (...) nous tentons d'établir des liens». Parmi eux, «deux ont été arrêtés à l'intérieur du complexe de l'université», a déclaré à l'AFP le porte-parole du ministère de l'Intérieur Mwenda Njoka.

Jeudi, le ministre de l'Intérieur Joseph Nkaissery avait annoncé l'arrestation d'un «présumé assaillant», durant les 16 heures de siège à l'université. Les autorités ont confirmé qu'il faisait partie des cinq suspects interrogés, sans autre détail. Les trois autres suspects ont été arrêtés alors qu'ils tentaient de fuir vers la Somalie.

 

Le Figaro