
Les spécialistes du terrorisme qui prennent les allumés du djihad pour des débiles mentaux devraient renouveler leurs grilles de lecture.
En surfant sur l’effroi provoqué par les attentats à répétition des deux principales enseignes du terrorisme mondial, Daech et AQMI, les politiques, mal conseillés par les services anti terroristes, servent trop souvent une vision caricaturale du djihadiste.
Les néo conservateurs américains des années Bush avaient déjà popularisé le concept de « guerre au terrorisme », ce néologisme qui permet de ne pas réfléchir. Sans doute François Hollande a compris l’avantage d’user et d’abuser de cette rhétorique guerrière. Histoire de mettre un peu de viagra dans ses courbes de sondages, mais pour si peu de temps….
Buté, analphabète et demain « apatride », le djihadiste se battrait avant tout pour une meilleure part du marché local. Cette vision a pu avoir une part de pertinence, voici quinze ans, quand les leaders du GSPC, pourchassés par l’armée algérienne, avaient migré vers le désert sahélien, épicentre des trafics. Ces islamistes aguerris ne disposaient que de peu de ressources, il leur fallut, sans prendre de gants, se faire une place au sein des filières locales, souvent avec la bénédiction d’Alger qui savait offrir quelques gâteries aux plus conciliants.
Changer de logiciel
Face à la progression foudroyante d’un idéologie djihadiste tous terrains, du Moyen Orient aux banlieues françaises en passant par Bamako, Abidjan, Niamey, il faudrait mieux changer de logiciel. A moins de croire comme le Premier ministre français, Manuel Valls, entre deux effets de manche, que comprendre la violence djihadiste, c’est déjà l’excuser.
La violence djihadiste ne se situe plus seulement, tant s’en faut, au seul croisement de la criminalité et du terrorisme. Après l’attaque dimanche dernier contre les touristes qui se reposaient en toute tranquillité sur les plages ivoiriennes, nos ennemis d’AQMI ont pondu un communiqué. C’est le signe qu’ils savent écrire et qu’ils ont un message à faire passer.
Ce qu’ils dénoncent, avec leurs méthodes barbares, ce sont les "interventions armées" de la France; d’autres qui ont lieu en Palestine, au Yémen, en Somalie; la « colonisation » des terres; la complicité enfin de l’armée tricolore avec « le Maliraciste », leur façon de dénoncer certains exactions commises par une population majoritairement noire contre les touaregs et les arabes.
Le propos, hélas, trouve un certain écho. Hors de question, naturellement, d’y répondre avec un revolver dans les reins. Mais François Hollande et les ministres qu’il envoie à Abidjan ne doivent plus seulement parler sécurité. Ils doivent aussi se placer sur ce terrain proprement politique et trouver les mots pour expliquer à l’opinion publique mondiale les raisons des interventions militaires que la Francemène sur cinq théâtres d’opération (1).
Sans être djihadiste, on commence à ne pas en comprendre toute la logique vertueuse.
(1) Ces intervenions militaires supposent que 35000 militaires soient mobilisés, et non 10000 comme on le lit souvent, si l’on compte aussi tous les soldats qui sont en repos, ou qui s’occupent en amont de la logistique ou de la gestion
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