Zoom Essahraa : Putsch d’Ouaga.. Comment est-il né et où se situe-t-il?

Zoom Essahraa : Putsch d’Ouaga.. Comment s'est-il formé et où s’est-il placé ?

Aux premières heures du lundi (24 janvier 2022), des soldats cagoulés prenaient position devant le siège de la télévision d'État dans la capitale burkinabé, Ouagadougou, alors que des sources au sein des mutins confirmaient l'arrestation, la veille dans la soirée, du président Roch Kaboré dans l'une des casernes militaires,

Il semble que la rébellion qui a commencé à l'aube du dimanche 23 janvier est en passe de se transformer en un coup d'Etat. Les rebelles réclamaient - selon des sources persistantes -, le limogeage d'un certain nombre de Chefs de l'armée et la fourniture d'équipements appropriés aux soldats dans leur guerre contre les groupes armés.

Le gouvernement avait annoncé par l'intermédiaire du ministre de la Défense son intention de négocier avec les insurgés, mais ces pourparlers, qui ont eu lieu hier soir (dimanche), sous les auspices d'éminentes personnalités sociales et religieuses, n’étaient arrivées à aucun résultat.

C'est le moment décisif d'une scène de putsch qui s'est dessinée il y a des mois au pays des braves hommes (Burkina Faso). Il était clair pour les observateurs que c’était là son dénouement final, malgré les tentatives du président arrivé au pouvoir à la fin d'une période transitoire, intervenue après une révolution, marquée par de nombreux hauts et bas, ayant conduit au renversement du président Blaise Compaoré.

Dans le "Zoom Essahraa" de cette semaine, nous essayons d'examiner les parties du portrait, comment la scène actuelle du coup d'État s’est-elle formée, quelle est la première lecture du nouveau régime et où devra-t-il se positionner dans la lutte de pouvoir ouverte entre la France et la Russie et quels seraient ses effets sur la volonté de fléchir l’intransigeances des militaires à Bamako... ?

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Une crise qui s'aggrave

Le Burkina Faso, qui a été l'un des premiers pays africains à avoir connu une grande vague révolutionnaire sous feu Thomas Sankara, souffre d'un lourd legs de crises économiques et sociales qui ont classé cet Etat  au bas des rapports internationaux dans les domaines de la pauvreté, de la mauvaise gouvernance ainsi que dans les indicateurs de développement global.

C'est cette situation qui a conduit à une révolution populaire massive contre Compaoré, lequel nourrissait des ambitions de se pérenniser au pouvoir en opérant des amendements constitutionnels dans ce sens.

Aujourd'hui et après plus de sept ans (Campaoré a été renversé en novembre 2014), ces problèmes semblent s'être aggravés. Le pays est actuellement confronté à un conglomérat complexe de ses anciens problèmes (pauvreté et fragilité des infrastructures) et d’autres liés à ses sept années de transition avec leurs titres incendiaires (les groupes extrémistes qui frappent à l'ouest, au nord et au centre du pays et tuent des dizaines par mois), en plus des conditions économiques et sociales difficiles et de l'acuité des luttes entre les élites politiques restées partagées entre les loyalistes de l’ère précédente et ceux de la nouvelle ère.

C’est en novembre dernier que cette crise qui couve depuis longtemps a commencé à éclater au grand jour :

- Tantôt sous la forme de mutineries dans les casernes.

- Une fois sous forme de manifestations populaires dans les rues,

- Tantôt en assiégeant les forces françaises et leurs convois de ravitaillement,

- Et une fois, même en révélant une tentative de coup d'État et en arrêtant les personnes impliquées, comme cela s'est produit il y a moins de deux semaines.

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Le profil des nouveaux arrivants

Il est encore trop tôt pour juger l'identité des nouveaux venus au pouvoir au Burkina Faso, mais des indications préliminaires étayées par des informations de sources dignes de foi ayant parlé à Essahraa Online, laissent penser que la "main française" n'est pas loin de ce qui s'est passé à Ouagadougou ce matin :

 

- Les meneurs du coup sont de jeunes officiers diplômés ou ayant suivi des formations spécifiques en France (certains l'ont été il y a seulement quelques semaines).

- Le cachet général du groupe rebelle, son discours et son programme déclaré sont proches des deux modèles putschistes existant au Tchad et en Guinée Conakry, dont les liens avec Paris ne font l’objet d’aucun équivoque.

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L’Instant zéro

En examinant le moment zéro du coup d'État burkinabé, sa corrélation avec ce qui se passe au Mali apparait clairement. Paris, qui se sent victime d’un coup de poignard stratégique dans le dos dans la région où elle avait une influence longue de plus de deux siècles, a décidé - présentement - d'utiliser toutes ses cartes pour discipliner la "rébellion géostratégique" menée par des putschistes soutenus par Moscou à Bamako. Ce qui nécessite le recours à d'officiers animés de la même vitalité, mettant à leur profit l’état de mécontentement grandissant de la rue, notamment cette opinion hostile à la France, pour former un nouveau régime, aidant à resserrer l'étau sur Bamako et qui constituera ultérieurement un pôle de la scène ouest-africaine capable de redessiner la relation avec la France au sein d'un toit peut-être un peu différent du précédent, mais qui, en fin de compte, préservera au moins, la « Grande Maison Stratégique"!.

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Probablement

Malgré les interrogations soulevées par le retard dans la publication du communiqué N° 1 du coup d'État au Burkina Faso sur ses réelles finalités, s’il sera un putsch ou une révolution de palais manquée, il est tout de même fort probable que la situation qui en résultera sera différente de celle qui prévalait, qu’il représentera, au moindre degré, un épisode du feuilleton de la bataille ouverte entre Paris et Moscou dans une région, devenue clairement le théâtre principal  des bousculades stratégiques entre les "grands".

mar, 25/01/2022 - 12:58

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