L’introduction d’importantes réformes de l’appareil judiciaire en Guinée au cours des dernières années autorise à croire « à la fin de l’impunité » dans ce pays, selon maître Amadou Tidiane Ball, expert de l’Organisation des Nations Unies (ONU).
Maître Bal est l’un des premiers avocats inscrits au tableau du barreau de Nouakchott en 1976. Il a été ministre de la justice et président de la Cour Suprême de Mauritanie, et travaille actuellement comme expert auprès de l’ONU, engagé dans le cadre de l’appui aux réformes de l’appareil judiciaire en Guinée.
Cet avocat est déployé depuis plus de 2 ans par les Nations Unies (ONU) pour encadrer un panel de juges chargés de faire la lumière sur les douloureux événements du 28 septembre 2009 et appuyer les réformes judiciaires dans ce pays.
Le 28 septembre 2009, dans un stade du même nom, devenu célèbre à travers la mémoire collective de millions d’amateurs du football en Afrique grâce aux exploits d’une talentueuse génération de joueurs guinéens des années 1970, a été le théâtre de massacres de plus de 150 personnes et de viols collectifs en répression à un meeting de l’opposition.
Ces faits se sont passés sous le règne d’une junte militaire dirigée par le capitaine Moussa Daddis Camara.
Pour le compte de l’ONU, l’ancien ministre mauritanien encadre un panel de juges instruisant ce dossier.
Une information judiciaire dans le cadre de laquelle « plusieurs ex responsables de la junte ont été entendus » à l’image du capitaine Claude Pivi, et de l’ancien chef de l’Etat, Moussa Daddis Camara, réfugié au Burkina Faso après une tentative d’assassinat sur sa personne.
Il a été auditionné par la justice de ce pays sur la base d’une commission rogatoire délivrée par un magistrat instructeur de Conakry.
Une mission de la justice guinéenne devrait se déplacer prochainement à Ouagadougou en vue de poursuivre son interrogatoire. Par ailleurs, Aboubacar Tomba Diakhité, autre ex haut responsable sécuritaire de la junte guinéenne, présumé auteur d’une tentative d’assassinat sur la personne de Daddis et présent sur les lieux des massacres et viols collectifs du 28 septembre, fait l’objet d’un mandat d’arrêt international.
Au chapitre des avancées, on note également le fait « qu’une vingtaine d’individus soient actuellement détenus à titre préventif dans le cadre de l’instruction de l’affaire du stade du 28 septembre 2009 ».
Des actes d’enquête significatifs laissant entrevoir l’espoir d’un procès en 2015, ont été posés au cours des dernières semaines, selon le parquet de la CPI.
La culture de l’impunité était ancrée dans les mœurs du fonctionnement de l’appareil judiciaire en Guinée à tel point qu’il était inimaginable de voir un juge convoquer le plus petit militaire ou agent des forces de sécurité. Du coup, les développements des dernières années représentent un important progrès sur le chemin de l’éradication de ce mal.
Ce qui explique les propos de Mme Fatou Bensouda, procureur prés de la Cour Pénale Internationale (CPI) se félicitant « des avancées et des efforts des autorités guinéennes appuyés par l’avocat et expert onusien dans la lutte contre l’impunité » à l’occasion des travaux des États parties de la CPI tenus à New York du 07 au 12 décembre 2014.
Le continent africain, confronté aux convulsions politiques et guerres, rappelle-t-on, reste un terreau favorable à l’impunité du fait d’une défaillance de la justice, à laquelle se substitue parfois la CPI, suscitant les critiques d’une partie de l’opinion qui dénonce « une justice à 2 vitesses » dont l’orientation politique vise les africains.
Les ONG de défense des droits humains de rappeler aux tenants de cette thèses que les victimes de massacres sont également africaines.
Le Calame