L’ancien ministre des Finances du Sénégal préconise de libéraliser la distribution de l’Énergie. La proposition n’enchante pas le président Macky Sall.
«Après avoir libéralisé la production d’énergie, les pays africains doivent libéraliser maintenant la distribution», lance Makhtar Diop, vice-président de la Banque Mondiale, lors de la première journée du Forum sur l’Emergence africaine tenu à Abidjan les 18 et 19 mars à l’invitation du PNUD.
La proposition, d’une «impérieuse nécessité» pour le représentant des institutions de Bretton Wood, prend à contre-pied la nouvelle doxa sur le Développment, celle qui préconise un Etat fort, actionnaire et developmentiste.
Et c’est d’ailleurs Macky Sall qui a tenu à recadrer son compatriote pendant quelques bonnes minutes, au risque de retarder son avion en partance pour le Nigeria. «Les modèles de contrat qui sont validés dans ces privatisations rémunèrent de façon excessive les charges fixes, au détriment de la rémunération sur l’investissement.», assène le président sénégalais qui sait mieux que quiconque que dans de tels contrats, les charges sont alourdies par les frais d’assistance technique et autres rubriques alors que la société de gestion accumule les profits.
De plus, martèle le président Sall, «Si on dit de privatiser la distribution, il faut rappeler que celle-ci à une vocation sociale, puisque nous devons produire de l’électricité pour tous. Nous devons faire en sorte que le monde rural puisse être intégré dans le réseau. Ce qui n’est pas la vocation du secteur privé».
Et de prendre le cas concret de la privatisation de l’eau qui a accouché de modèles de contrats de concession où la gestion est aux mains du privé alors que le patrimoine et le risque de portefeuille incombe à l’Etat.
Autre exemple invoqué par le président du Sénégal, la privatisation du rail entre Dakar et Bamako, concédée rappelons-le, à Abbas Jabber dans des conditions qui, selon nous, restent à élucider. Dans ce cas précis, faut-il incriminer le principe de privatisation en lui-même ou un cas particulier de bradage du patrimoine de l’Etat?
Si les exemples de privatisation ont échoué au Sénégal et au Gabon ( cas de la distribution de l’eau par la SEEG – Veolia), l’on ne peut pas en dire de même de la Côte d’Ivoire où la CIE (Compagnie ivoirienne d’électricité) libérée du poids direct de l’Etat, est devenu championne.
Après une telle critique objective, le président Sall va t-il faire évoluer les modéles de partenariat PPP proposés jusque-là aux pays africains ? Pourra-t-il, dans cette optique, compter sur le soutien du président Ouattara qui n’a eu de cesse, tout au long du forum, de rappeler sa fonction d’ancien directeur général adjoint du FMI et les propos de son ancien patron, Michel Camdessus, qu’il cite de mémoire?
Pour le moins, la rencontre sur l’Emergence à Abidjan à mis en relief la complicité fraternelle entre les présidents Ouattara et Sall et leur mutuelle admiration de leurs plans respectifs pour l’émergence.
Financialafrik