
En obtenant plus de 58 % des voix, le président sénégalais sortant a été réélu dès le premier tour, selon les résultats provisoires publiés le 28 février. Pour cet éditorialiste burkinabé, ce triomphe ne doit pas masquer les immenses attentes des Sénégalais pour ce second mandat.
Si aucune liesse populaire extraordinaire n’a été observée dans le camp du vainqueur, il faut toutefois reconnaître que Macky Sall a réalisé un score sans appel. En face, l’opposition rejette en bloc ces résultats, mais paradoxalement, refuse de présenter le moindre recours devant le Conseil constitutionnel.
Cette élection était particulièrement attendue compte tenu de la tension politique née de l’éviction de la compétition, par justice interposée, de deux poids lourds, Karim Wade et surtout l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall. Mais cette présidentielle porte un bon taux de participation, qui s’élève à plus de 66 %, preuve de l’engouement des Sénégalais pour ce vote.
Hantise du second tour
C’est donc sans bavure que Macky Sall, 57 ans, a réussi son pari, qui était de gagner dès le premier tour, “un coup K.-O.”. Conscient que le second tour n’a jamais porté bonheur au chef de l’État candidat à sa propre succession en raison du danger d’une coalition des opposants, le candidat présidentiel a mené une campagne électorale intense.
La hantise du second tour l’a poussé à repousser ses limites physiques et stratégiques pour éliminer tout obstacle qui pourrait contrarier ses ambitions de garder son fauteuil. On ne saurait occulter ses opérations de charme auprès desserigne [“guides spirituels”, en wolof] et autres chefs de confrérie religieuse.
Mais le plus important, c’est son bilan, qu’il a défendu comme très positif, mettant en avant les gigantesques infrastructures réalisées sous son règne, notamment le nouvel aéroport international Blaise-Diagne [inauguré en décembre 2017].
Au Sénégal, une croissance pour tous
Mais les Sénégalais attendent plus du prochain mandat de Macky Sall, qui doit viser la création d’emplois pour les jeunes, et rendre plus inclusive la croissance [6,8 % en 2018], que nombre de ses concitoyens ne ressentent pas dans le panier de la ménagère.
Si la mise en œuvre de la deuxième phase de son Plan Sénégal émergent (PSE) [lancée en 2014, la première phase s’est principalement traduite par la réalisation de grands travaux] n’est pas que promesse électorale, peut-être que les Sénégalais connaîtront le mieux-être dont ils ont rêvé en vain sous le premier mandat de Macky Sall [élu en 2012].
Mais le plus urgent et surtout le plus titanesque des travaux du président réélu sera de recoller les morceaux d’un tissu social qui va en lambeaux.
Morin Yamongbe
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