Les deux parties conflictuelles du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) confirment leur confiance dans le président et leader du parti, Ahmed Ould Daddah, mais les indicateurs et le processus des tiraillements qui les opposent révèlent la profondeur de la crise au sein du plus ancien parti de l'opposition mauritanienne, au point que certains évoquent la rupture proche voire imminente des liens entre les deux ailes et l’impossibilité de militer dans le même cadre politique.
Racines profondes
La crise a éclaté depuis une semaine seulement mais ses racines remontent au fil des années, ont affirmé des sources fiables à Essahraa :
✔ Certains de ces fils datent du processus adopté par le parti depuis 2005, dans lequel il a opté pour une opposition modérée après des décennies de « radicalisme », avant que le tempérament du parti ne se développe en un soutien au coup d'État de 2008, le qualifiant de mouvement rectificatif. Une attitude sur laquelle, le RFD s’est ensuite rétracté et rejoint l’opposition.
✔ d’autres sont par contre plus récents avec l’arrivée du président Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, sa validation par le président du parti et le soutien apporté par le RFD à son processus d’apaisement approuvé par la plupart des forces politiques nationales.
✔ Le troisième élément, qui serait la goutte d'eau qui aurait fait déborder le vase et miner le parti serait les dernières élections, les investitures et les résultats de celles-ci en plus des négociations qui se sont terminées par la signature d'un pacte entre certains partis de l’opposition et d’autres de la majorité soutenant le gouvernement.
Le moment d’implosion
Le malaise sanitaire connu par le président du parti, suivi d’un voyage de convalescence à l’étranger à la fin de l’an dernier et au début de 2024, aurait été le moment critique qui a mis au grand jour le conflit chronique, surtout après l’apparition d’une délégation d’administration du parti confiée à une figure qui semble être l'une des personnalités centrales de la situation de crise interne du RFD.
Le retour du président Ahmed de France, où il avait bénéficié de soins, fut le début de l’émergence des différents qui couvaient depuis longtemps. En effet, les voix des contestataires ont commencé à s’élever et à dénoncer ce qu’elles appellent une prise d’otage du parti par un groupe minoritaire. Des accusations formellement démenties par la partie mandatée de la direction du RFD au cours du voyage médical du président du parti, les considérant comme de simples querelles politiques.
Le début de la crise avait l’air d’une controverse juridique sur le dépassement des vice-présidents de la délégation à un membre du Bureau Exécutif. Les deux parties en conflit avaient présenté des arguments invoquant les statuts et les règlements du parti, avant de se développer en une convocation d’un Congrès extraordinaire et d’une opération visant à faire front à une aile très dure, avec des accusations de fermeture des sièges et de mise en quarantaine du président.
Une situation qui a atteint son paroxysme le mardi passé avec l’intervention de la police afin d’empêcher l'une des partis d'entrer dans le siège pour tenir une conférence de presse.
Parties au conflit
Les RFDistes se sont divisés en trois blocs pendant cette crise, indiquent certaines informations disponibles :
✔ Le premier est dirigé par le secrétaire permanent du parti, M. Imam Ahmed et le trésorier, M. Yacoub Diallo. C'est le bloc qui a été mandaté par le président Ahmed Ould Daddah pendant son absence médicale. Une aile qui semble bénéficier d'un fort soutien de sa part, puisque plusieurs déclarations et communiqués publiés portaient le nom de ce goure, privant toute légitimité à ceux qui lui faisaient concurrence.
✔un bloc composé d’un important groupe de leaders historiques du RFD, dirigé par la parlementaire et leader historique Nana Mint Cheikhna Ould Mohamed Laghdaf et le leader Mohamed Abdallah Ould AChvagh. C'est un bloc qui semble avoir la majorité au sein du Bureau Exécutif. Il gère également la communication du parti ; ce qui lui a assuré une présence notoire dans l'opinion publique par rapport au bloc opposé jouissant du soutien du président dans des communiqués signés et des déclarations audiovisuelles.
✔️ Face à ces deux précédents blocs se rivalisant les sièges, les déclarations et les communiqués, se trouve un troisième bloc, comprenant ceux qui ont démissionné et sont partis, comme c'est le cas de l'ancien député Abderrahmane Ould Mini. Il compte aussi dans ses rangs , en plus de ceux qui ont exprimé leur mécontentement à travers le silence, considérant la manière avec laquelle la crise a été gérée d’ inappropriée, surtout le fait d’impliquer le président du parti, sa symbolique e et sa notoriété morale dans des conflits, implicites des aspects et intérêts personnels plus que des positions et des orientations.
Jusqu’où..?
Le suivi de la question de la crise au sein du parti n’est plus limité aux seuls RFDistes, comme c’est le cas d’ailleurs des impasses politiques qui apparaissent de temps à autre dans tel ou tel parti. Bien au contraire, la crise est plutôt devenue une question d'opinion publique, en raison fort probablement à nuire à l'histoire du parti et au symbolisme de son chef, ainsi qu'au moment extrêmement important à la veille du début de la course présidentielle. De là, se pose alors l’interrogation jusqu’où ?
L’un des trois scénarios suivants serait la réponse à apporter à ces interrogations:
1- Scénario de fission ; ce que certains pourraient décrire comme étant un remake de l’histoire, puisque l’UFD/ ère nouvelle, père de l’actuel RFD, avait vécu auparavant au cours des années 90 du siècle dernier une situation similaire.
Mais ce scénario semble peu probable, puisque les deux parties en conflit sont attachées au président Ahmed Ould Daddah.
2- Le deuxième scénario est celui du succès des tentatives d’apaisement, une option qui n’est pas renforcé par les nombreux indicateurs.
3- Le troisième est le scénario de coexistence avec la crise : ce qui signifie que la crise restera ouverte en attendant l'émergence de nouvelles données, consolidant le scénario de réconciliation souhaité par de nombreux partisans du parti, qui n’aiment pas pourrir le désaccord capable de mener le RFD vers un sort qui contraste à la conviction unanime de tous sur le parcours historique et exemplaire du RFD.