
La visite du Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a été largement suivie, non seulement dans les deux pays que sont la Mauritanie et le Sénégal, mais aussi dans la région ainsi que par les cercles d'intérêt et de conflit y liés.
La visite, qui a débuté dimanche et a duré trois jours, intervient à l'invitation du Premier ministre Mokhtar Ould Diay. Elle vise, comme le montrent clairement ses séquences et son ordre du jour, à dessiner l'avenir des relations et à renforcer celles-ci entre les deux Etats bordant le fleuve Sénégal et liés par des relations et des rapports profonds et multidimensionnels.
Dans le présent Zoom Essahraa, nous examinons le contexte des visites et les perspectives qui façonneront l’avenir, lesquelles commencent très probablement par l’avenir du gaz et outrepassent le présent et l’avenir des régions du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest.
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À propos du contexte sur les deux rives
En Mauritanie, comme au Sénégal et dans l’environnement tout autour des deux Etats, il y a des événements et des développements qui forment ensemble un contexte qu’il faut évoquer comme introduction pour pouvoir s’appesantir sur la visite.
La visite intervient quelques semaines seulement après le début de l’exploitation commune du gaz au niveau de l’un des trois champs de Great Tortue Ahmeyim GTA après des reports répétés. Un événement considéré comme historique et essentiel pour la croissance économique des deux pays et grâce auquel, Nouakchott et Dakar entrent officiellement dans le club des pays producteurs de gaz avec des réserves qualifiées d’énormes et des plus importantes de la région ouest-africaine.
- Elle intervient également à un moment où l’ultimatum de sortie de la CEDEAO accordé à trois importants pays approche de son échéance. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont décidé en effet de poursuivre leur projet visant à créer une confédération et de se détourner des tentatives de réintégrer l’organisation, dont le Sénégal est membre à part entière, alors que la Mauritanie est membre observateur (elle s’était retirée de son adhésion à la fin du siècle dernier après en avoir été membre fondateur).
- Cette visite s’effectue dans un contexte de débats tendus entre Paris et un certain nombre de dirigeants africains après ces déclarations tenues par le Président français Emmanuel Macron et considérées comme insultantes au niveau de plusieurs cercles. L'une des premières et plus fortes déclarations en réponse au président français a été celle du Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko.
- Elle coïncide aussi avec la visite effectuée par le Président soudanais au Mali et en Mauritanie ; ce qui est considéré comme un indicateur de concurrence internationale et régionale. Le Soudan, qui traverse une période de grave instabilité, est désormais considéré comme faisant partie de l’alliance russe en Afrique.
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Contours du partenariat
Au cours de l'échange de paroles, les chefs des gouvernements sénégalais et mauritanien ont dessiné les caractéristiques du partenariat :
- Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a souligné l'importance d'ouvrir les frontières entre les deux pays et de lever tous les obstacles qui empêchent l'intégration économique.
Les frontières doivent être ouvertes et il faut qu’il y ait plus de Mauritaniens au Sénégal et vice-versa. Ensemble, les deux pays peuvent former un marché fort et intégré, a déclaré Sonko dans son discours adressé aux hommes d’affaires mauritaniens et sénégalais à Nouakchott.
La coopération entre les deux Etats ne devrait pas se limiter au gaz et au bassin du fleuve Sénégal, mais devrait inclure tous les secteurs tels que la pêche et l'élevage, a-t-il dit.
Sonko a évoqué l’importance du secteur énergétique pour l’industrialisation et la transformation agricole, révélant l’ambition du Sénégal de porter sa production énergétique à 10 000 mégawatts d’ici 2050, contre 1 700 mégawatts actuellement.
Aucune économie ne peut prospérer sans une énergie de qualité à des prix compétitifs, a précisé le Premier ministre sénégalais, appelant à œuvrer pour fournir une énergie durable et accessible à tous afin de soutenir le processus de développement.
Dans le même sillage, le Premier ministre Mokhtar Ould Diay a pris la parole, soulignant l'importance du partenariat entre les secteurs privés mauritanien et sénégalais pour renforcer la coopération économique entre les deux pays.
Ould Diay a appelé lors d’une table ronde qui a réuni des représentants du secteur privé des deux Etats, à une action commune. Pour cela les deux secteurs privés sont appelés à travailler la main dans la main en multipliant les cadre et partenariat public – privé, les plateformes de dialogue et d’échange d’expériences, les joint-ventures ainsi que les mécanismes d’inclusion de nos jeunes et femmes et de promotions des start-ups, a-t-il indiqué.
Le secteur privé sénégalais sera le bienvenu en Mauritanie et il a été pris bonne note des problèmes posés et surtout les problèmes portant sur les formalités administratives, a ajouté le Premier ministre Ould Diay, selon lequel, la Mauritanie qui accueille toujours le secteur privé sénégalais et renforce son ouverture à des partenariats fructueux, dispose de multiples ressources, notamment énergétiques, agricoles, marines et hydriques.
Et de préciser que ce potentiel fait d’elle un partenaire idéal pour renforcer la coopération économique avec le Sénégal. Toujours selon lui, ces ressources représentent de grandes opportunités de développement et d’investissement au moment où les deux pays ont tout le potentiel pour réaliser des partenariats stratégiques fructueux.
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Le Gaz et le Sahel
Bien que le discours officiel simplifie tous les domaines de coopération, il est probable que les deux dossiers les plus importants à l’ordre du jour de la Mauritanie et du Sénégal actuellement et dans un avenir proche soient :
Le dossier du gaz est important pour les deux pays, non seulement du point de vue économique et de développement, mais aussi en raison de son impact sur leur positionnement dans l’environnement régional et sur la scène internationale.
- Le deuxième dossier est celui du Sahel. Les deux pays peuvent jouer ensemble un rôle majeur dans le rétablissement de la stabilité et de la cohésion de la région, eu égard à leurs relations étroites et étendues avec les acteurs de la région et ceux qui y sont en conflit.