Zoom Essahraa (31).. La Mauritanie réussira-t-elle à ressusciter le G5 Sahel?

Zoom Essahraa (31).. La Mauritanie réussira-t-elle à ressusciter le G5 Sahel?

Nouakchott s’est vue hériter, après des semaines de mouvements diplomatiques, militaires et sécuritaires intervenus tous en Mauritanie, dont la participation de délégations de haut rang des pays et axes d'attraction de la région, la présidence tournante du Groupe des Cinq Etats du Sahel lors d'un sommet organisé dans la capitale tchadienne, N'Djamena.

 

Une rencontre au cours et après laquelle, le nouveau président du Groupe Mohamed Ould Cheikh Ghazouani, a affirmé qu’il ne ménagera aucun effort pour ressusciter l’organisation, afin qu’elle puisse reprendre son rôle dans ce qu'on appelle la lutte contre les groupes de violence dans la région du Sahel.

 

Dans le Zoom Essahraa de cette semaine, nous rassemblerons sous ses angles  l'image découpée de la scène: rappel de la visite et des déclarations de Lavrov, l’annonce de Ouagadougou de la fin de la présence militaire française sur son territoire, les déclarations du ministre tchadien des Affaires étrangères saluant - quoique avec réserve - le rôle de la Russie dans la sécurisation du Sahel, pour nous nous interroger,  si la Mauritanie réussira à ressusciter le Groupe des Cinq et à le hisser à un niveau lui permettant d’avoir des partenaires multiples.

 

Ou bien, le conflit entre l'Ouest et l'Est c’est-à-dire, Paris et Moscou, continuera de faire régner sur le Groupe l’état de mort clinique dans lequel il s’était plongé depuis le retrait d’un Etat fondateur et pivot, qui a quitté le camp de l'Ouest vers celui de l'Est, devenant du coup le fer de lance de la présence russe en Afrique de l'Ouest, à savoir le Mali et son régime militaire.

 

« « « 

Le moment de la mort clinique

 

Le Groupe, fondé à Nouakchott il y a neuf ans (16 février 2014), vit depuis mai dernier dans un état de mort clinique, en raison du refus du Tchad de céder sa présidence tournante au groupe militaire au pouvoir à Bamako.

 

Une mesure qualifiée par Assimi Goïta et ses camarades de décision française s’inscrivant dans le cadre de la volonté de Paris de sanctionner le Mali pour avoir exercé son droit de changer ses alliances, annonçant son retrait de l’organisation régionale, conduisant du coup vers le gel du Groupe et l’accélération du rythme des transformations.

 

A ce qui précède, s’ajoute aussi le cercle de la grogne et de rébellion contre le partenaire principal, et peut-être le seul dans le passé à savoir la France, avant que Bamao ne soit rejointe par Ouagadougou et que Nouakchott et N’Djamena commencent quant à elle à s’orienter vers des positions moins aigues envers l’arrivant russe.

 

 Bien que le moment de la mort clinique est survenu en mai dernier, ses signes précurseurs s’étaient manifestés au contraire bien avant et certains sont même apparus avec la création du G5 Sahel.

 

✅ Des Etats fondamentaux de la région, avec à leur tête l'Algérie et le Sénégal, étaient embarrassés dés le début par sa naissance (Alger du fait qu’elle considérait le G5 Sahel comme un bras d'influence français brandi sur sa tête) et Dakar, du fait qu’elle perçoit dans ce nouveau-né, une ferme volonté de l’éloigner des stratégies de sécurité dans la région.

 

✅ les grandes puissances internationales d'influence, la France, l'Allemagne, l'Amérique et la Grande-Bretagne d'une part et la Chine et la Russie d'autre part, se disputaient le nouveau-né alors en gestation, œuvrant chacune de son côté à l'utiliser pour ses propres agendas.

 

✅ Et la Mauritanie, qui à l’origine de l'initiative de création du Groupe et de l'état-siège, soucieuse de diriger l’organisation : jugée par un certain nombre de partenaires d’individualiste et de ne pas être rassurante quant à leurs attentes pour la région et à ce qu’elles y cherchent

 

✅ Au final, le groupe des cinq s'est transformé en un grand titre, soulevant des slogans faisant l’objet d’un large consensus. Toutefois, les complexités de la situation géostratégique ont décidé que son influence resterait, même avant le stade de la mort clinique, bien inférieuer aux attentes placées en elle.

 

« « 

Le défi de renaitre de nouveau

 

Aujourd'hui, alors que le Groupe est sorti de l'état de mort clinique, et que le complexe de la présidence tournante a été surmonté, lorsque la Mauritanie a accepté de l’hériter et de l’assumer, la question qui se pose maintenant est alors : réussira-t-elle à faire renaitre cet ensemble régional ? Et si oui, à quel prix y parviendra-t-elle et dans quelle orbite naviguera le Groupe dans son nouvel accoutrement ?

 

 Il est possible de parler ici, en fonction des données disponibles et des indicateurs observés, d'un scénario probable pour le succès de l'opération et d’un autre qui suscite de l’inquiétude quant à son avenir :

 

1- En ce qui concerne le scénario de l'optimisme, ses facteurs encourageants les plus importants sont :

 

- Le sens apparent des forces de la concurrence internationale pressentant le danger du laxisme dans l'emprise de la coordination régionale face aux groupes de violence ; ce qui peut menacer toute la région de tomber sous l'emprise de groupes hostiles à tous de la même manière.

 

- Le recul de sensibilité du nouvel acteur par rapport au Groupe. Moscou, qui le considérait comme un outil français, le perçoit désormais, à l’image de l'élargissement de son influence, l'opportunité d'un futur partenariat avec des perspectives plus prometteuses, une efficacité accrue et une légitimité plus grande.

 

2- Les raisons de pessimisme et de prudence sont dominés par :

 

- La France, même si elle apparaît comme le cerveau de la scène au Sahel, possède les outils d'influence, la rendant capable, de perturber, peu soit-il, la scène de transition d’une situation qu’elle dominait et pour laquelle, elle a consenti de grands sacrifices pour l’avènement de la sécurité, pour elle et pour les régimes alliés, à une situation où le maitre mot reviendra à un ennemi juré se présentant comme un partenaire alternatif dans un flanc vital.

 

- Les groupes de violence qui déploient leur influence sur de vastes étendues des terres du Mali et du Burkina Faso ont les yeux fixés sur le reste des pays et ne ménageront par conséquent, aucun effort pour faire obstruction au processus de renaissance de l’organisation.

 

 « « « 

En conclusion

 

Bien que le pari mauritanien de relancer le Groupe des Cinq Etats du Sahel et de redonner un rôle de premier plan à la région à travers elle, soient confrontés à de sérieux défis, il peut toutefois être relevé, d’autant que les courants des changements semblent, dans le contexte actuel, souffler en sa faveur.

 

Essahraa

mer, 22/02/2023 - 18:07

Actualités